Nous recrutons. Mais savons-nous ce que cherchons ?

Les processus de sélection sont l’objet de grande attention. Connaissons-nous ce qui permet de réussir dans le rôle ? Par rapport à quoi sélectionnons-nous alors ?

Le travail en amont du recrutement, pour clarifier réellement les défis et identifier les facteurs discriminants de succès, respectivement d’échec, nécessite impérativement de l’attention et du temps. Il demande aussi des méthodes adaptées aux exigences du 21ème siècle. Comment s’y prendre ?

Article AGEFI – Février 2019 – Daniel Held
Les chasseurs de tête nous présentent les avantages du rôle qu’ils cherchent à nous vendre. Les annonces parlent le plus souvent des responsabilités et des exigences de formation et de personnalité. Mais on ne parle presque jamais des résultats qu’on cherche à atteindre, de l’impact réel qu’on attend de la personne qu’on va engager ni du contexte culturel qui prévaut.

Les annonces sont donc le plus souvent d’une banalité affligeante. On dit ce que la personne devra faire, les multiples compétences attendues, mais très rarement en quoi elle créera vraiment de la valeur, les défis qu’elle devra réellement relever et les conditions culturelles qui seront déterminantes pour son succès. Nous observons à ce niveau que les recruteurs manquent souvent de vision et de recul analytique, mais aussi qu’ils ont souvent peur de mettre sur la table les réels défis qui pourraient faire fuir les talents.

Les conséquences sur le processus de recrutement sont évidentes : on se concentre sur les connaissances, l’expérience et l’impression générale, plutôt que sur les résultats obtenus et sur les conditions de l’environnement. Et ces conditions sont celles qui sont les plus intéressantes, parce qu’elles ne disent pas ce que la personne sait faire – les compétences sont le plus souvent là – mais dans quel contexte elle est performante, respectivement dans quelles situations elle peut être en difficulté – en bref, la dimension culturelle[1].

On prend donc le risque d’attirer des talents qui vont découvrir dans l’action les vrais défis, avec un risque de sentiment de trahison (on m’a caché la vérité) mais aussi de se trouver face à des exigences pour lesquels ils ne sont pas armés, parce que non abordées.

Le travail en amont du recrutement, pour clarifier réellement les défis et identifier les facteurs discriminants de succès, respectivement d’échec, nécessite impérativement de l’attention et du temps. Il demande aussi des méthodes adaptées aux exigences du 21ème siècle. Comment s’y prendre ?

Lorsqu’il s’agit d’un rôle à occuper dans une organisation déjà définie, ce qui compte, c’est d’identifier les enjeux clés du rôle, les principaux résultats attendus (l’impact, la valeur ajoutée), les incidents critiques (les événements qui font vraiment la différence, où le collaborateur est exposé et peut être mis en difficulté), et surtout de comprendre comment un individu arrive au succès dans un contexte organisationnel et culturel (degré d’autonomie, formalisme vs. risques) et relationnel (comment s’établissent confiance, respect et dialogue notamment) donné.

Une analyse du travail permet de bien comprendre les enjeux pour les postes bien cadrés et récurrents. Nous recommandons plutôt d’adopter une démarche orientée résultats : quels sont les attributs des collaborateurs qui ont du succès aujourd’hui ? En utilisant des outils d’évaluation scientifiquement robustes[2] sur des échantillons bien choisis de titulaires, on arrive très facilement à dégager des tendances culturelles, qui sembleront toujours évidentes après coup, mais auxquelles, étant dans le contexte, on ne fait pas toujours attention. L’alternative – qu’il faut toujours choisir pour les postes « uniques » – c’est de travailler avec le management et d’autres acteurs concernés, en les interrogeant sur les résultats attendus et en les amenant à se mettre d’accord sur les compétences qui doivent impérativement être présentes pour réussir[3]. Un débat bien mené, avec des acteurs bien choisis, se révèle rapide et efficace. Ce travail peut prendre un peu de temps. Mais quelle différence pour le processus de sélection ! Si la statistique ou un processus performant nous disent quels sont les facteurs démontrés de succès, il deviendra facile de dire non à ceux qui ne les ont pas, même s’ils nous plaisent bien.

Une démarche bien conçue en amont donne tout son sens, mais pose aussi de réelles exigences aux processus d’évaluation. Combien d’outils psychométriques et d’assessment sur le marché permettent-ils de réellement répondre à des questions précises, au-delà des évidences liées à ses préférences, à ses compétences générales de leadership, de relation, d’analyse et de résistance à la pression ? Poser la question, c’est y répondre, et cette réponse ne peut que nous interroger sur les processus de recrutement et de sélection actuels, rarement taillés pour les défis du futur.

Dans un monde de plus en plus complexe, exigeant, changeant et incertain, sélectionner les bons profils devient crucial, parce que les échecs coûtent de plus en plus chers pour tout le monde. Ce n’est pas le prix ni le nombre d’outils qui fera la différence. C’est la qualité et la rigueur du processus, les compétences des acteurs et les performances des solutions mises en place qu’il s’agit de privilégier. Avez-vous vraiment évalué ceux-ci ?[4]


[1] Les études démontrent que plus d’un échec sur deux est lié à la dimension culturelle, beaucoup plus qu’à des déficits de compétences.
[2] Les outils Saville Assessment (Aptitude, Wave), qui sont les plus puissants et robustes scientifiquement au monde, conviennent tout particulièrement pour cet exercice, en permettant d’identifier les compétences clés et l’environnement culturel associé. Des tendances se dégagent déjà dès 10 profils bien choisis.
[3] Nous utilisons le plus volontiers des cartes compétences, qui permettent des discussions passionnantes et une remise en question facile des hypothèses, jusqu’à trouver une solution adaptée.
[4] Voir les solutions « Hire » et les recherches scientifiques menées par Saville Assessment pour challenger chacune des étapes et composantes des processus de recrutement à l’ère du 4.0. Plus sur www.piman.ch et www.savilleassessment.ch

Daniel Held • 1 septembre 2018
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